Le maître des horloges

Pendant la campagne présidentielle, le futur président avait expliqué à plusieurs reprises la haute image qu'il avait de la fonction présidentielle. Il avait souvent critiqué François Hollande, celui qui l'avait nommé ministre, celui qui avait abaissé la fonction présidentielle en parlant à tort et à travers, notamment à des journalistes. Macron avait théorisé le "président jupitérien", celui qui ne gouverne pas mais préside, celui qui reste solennel au-dessus du buzz médiatique. Après son élection, il nous avait gratifiés d'un autre surnom, tout aussi arrogant, le "maître des horloges". Par ce terme, notre cher président voulait expliquer au peuple, que c'est lui et lui-seul qui décidait. Lorsque une annonce était prévue et qu'elle était repoussée de plusieurs jours, les journalistes de BFM étaient en extase "Oh, il nous montre qu'il est bien le maître des horloges". Les gens normaux, confus, se demandaient alors pourquoi mentir et faire attendre les gens était vu comme une chose positive.

Il y a quasiment un an, le ministre de l'Intérieur a démissionné et notre président a eu la chouette idée de ne pas le remplacer tout de suite et d'attendre 10 jours. Encore une fois, la télévision nous a sorti le couplet du "maître des horloges", mais maintenant, ça ne marchait plus. La lune de miel était finie, les français n'étaient plus ébahis par le charisme du candidat Manu, ils étaient dégoutés par le président Macron. C'est la goutte d'eau qui a fait déborder le vase dans la tête de nombreux français et qui a mené aux Gilets Jaunes (en fait non, ce n'est pas du tout ça, mais pour la continuité du récit, j'aime le faire croire). Les gens ont commencé à montrer leur hostilité et notre cher président a réagi. Il a fait un beau discours à la télé où il a expliqué qu'il regrettait certaines des ses paroles, de ses actions, qu'il avait pu sembler arrogant ou méprisant. Il rajouta qu'il allait alors changer et qu'on allait tous pouvoir parler dans le Grand Débat, mais c'est une autre histoire. Etait-il naïf de croire qu'il avait changé ? Pouvions-nous espérer que dorénavant, les ultimatums et dates limites seraient respectées ?

Suite aux élections européennes, les chefs d'état devaient se mettre d'accord pour désigner un successeur à Jean-Claude Juncker pour présider la Commission Européenne. D'après le système en place, cela devait être un allemand membre du PPE. Notre cher président, mécontent de ce choix, fit tout pour bloquer sa nomination. Finalement après plusieurs semaines de blocage Ursula von der Leyen, allemande membre du PPE, fut choisie. Chaque pays devait ensuite désigner un commissaire européen pour former la Commission von der Leyen. Chaque pays avait jusqu'au lundi 26 août (hier) pour désigner un candidat. Chose curieuse, la France, n'avait officiellement désignée personne hier (pour vous montrer à quel point c'est mal, tout le monde avait fait ses devoirs sauf nous et l'Italie qui sont les méchants populistes, c'est la honte). Pire, le sujet était complétement ignoré par nos médias nationaux obnubilé par le G7. Hier, c'était la clôture du G7, et notre cher président était en conférence de presse. Une personne courageuse osa interroger le chef de l'Etat sur cette question. Il répondit ainsi "A chaque jour suffit sa peine" avant de préciser qu'il désignerait quelqu'un demain matin (donc aujourd’hui). Cette réponse est très mauvaise, car il aurait très bien pu désigner quelqu'un avant le début du G7, personne ne l'obligeait à attendre le dernier jour. J'ai cherché dans un dictionnaire la définition de "matin", je cite "La première partie de la journée qui se termine à midi". Nous sommes le mardi 27 août 2019, il est 12h10 et nous n'avons toujours pas de nom. Pourquoi ? D'où vient ce plaisir malsain à donner soi-même des délais qu'on ne respecte pas ? Est-ce ça l'attitude que l'on attend d'un président ? Je ne pense pas. (27/08/2019)