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La déontologie dans le traitement de la politique américaine : le retour

Illustration de l'article
Hier, j'avais exprimé mes doutes sur un reportage d'une certaine émission de TMC qui tentait de présenter les candidats pour l'investiture du parti démocrate en vue de l'élection présidentielle américaine de 2020. J'appréhendais donc le deuxième volet de cette série, mais il s'avère qu'il était beaucoup plus réussi que le premier. C'est comme si l'équipe avait lu mon article et écouté mes critiques (en vrai, ce n'est pas possible car le sujet avait déjà été filmé et probablement monté avant la parution de mon article, mais chut!).

Dans l'émission d'hier, le journaliste avait pris l'avion et se trouvait directement sur le plateau ce qui nous a évité ces horribles séquences d'autopromotion que sont les duplex. Ce sont des séquences où le présentateur tente par tous les moyens de montrer que le monde extérieur est étrange, donc il va interrompre le journaliste toutes les trente secondes pour lui demander "Oh, dis donc, qu'est-ce que c'est que ce panneau derrière toi ? C'est un panneau américain ? Qu'est-ce que ça dit ?". Donc, le journaliste a pu tranquillement lancer le sujet depuis le plateau sans perdre du temps à présenter le spectaculaire café de Las Vegas. Avant le sujet, nous avons eu droit à un petit générique comme l'émission aime en produire pour tout et n'importe quoi. Le journaliste a ensuite annoncé qu'il allait parler de Pete Buttigieg. Ouf, c'est (pour le moment, en tout cas) un candidat un peu crédible. Les lecteurs assidus auront remarqué que j'avais mentionné le "Mayor Pete" comme candidat potentiellement interviewable dans l'article d'hier. M'ont-ils écouté ? (Non, c'est impossible, le sujet a été tourné avant la parution de mon article, je vous l'ai déjà dit).

Contrairement à Julian Castro, le journaliste va ici donner des pourcentages pour présenter Buttigieg, il explique "Il est passé en 15 jours du statut d'inconnu à 5% d'intentions de votes". Premièrement, ce n'est pas 15 jours, il est testé dans les sondages depuis fin janvier et sa notoriété soudaine est venue lorsqu'il est passé sur CNN le 11 mars. Deuxièmement, effectivement dans le plus récent sondage, il est à 5%, mais c'est la première fois qu'il atteint un tel score et ça peut être une anomalie, dans mon modèle il était aux alentours de 2%. Enfin, je ne suis pas sûr que le TFM (Téléspectateur Français Moyen) comprenne vraiment que 5% est un très bon score. Il faut rappeler que les sondages sont dominés par Joe Biden et Bernie Sanders qui à eux deux, cumulent plus de 50% des intentions de vote, que le nombre de candidats est historiquement élevé (ils n'ont jamais été aussi nombreux) et qu'aucun des candidats restants ne dépasse les 10%. Pour le moment, il est donc logique de s'intéresser à Buttigieg, l'avenir nous dira si l'attention médiatique arrivera à le maintenir jusqu'en 2020.

Comme l'émission est avant tout une émission de divertissement, il leur est interdit d'aborder les sujets de fond trop longtemps donc le sujet commence par un montage de plusieurs américains qui n'arrivent pas à prononcer correctement Buttigieg (l'anglais est une langue étrange). Ensuite, on commence à nous présenter Pete Buttigieg, on nous dit qu'il est jeune, qu'il n'est pas connu depuis longtemps, qu'il est charismatique et ambitieux et que s'il est élu, il veut réformer le système. Si vous êtes français, cette description devrait vous rappeler quelqu'un et vous terrifier mais c'est l'angle choisi par le reportage. Lorsque le journaliste va voir Pete (oui, je l'appelle par son prénom, c'est plus court), il lui demande si son âge n'est pas un handicap et Pete lui répond que d'autres ont été élus jeunes en référence à notre propre président (il savait qu'il parlait à la télé française). Malheureusement, notre journaliste français ne peut pas accepter les sous-entendus, il faut que tout soit dit clairement à l'antenne, c'est le groupe TF1 tout de même, alors il le relance en lui demandant à qui il pense. C'est alors, que Pete, probablement lassé, se résout à lancer le nom de Macron pour le plus grand bonheur de notre chaîne privée.

Je ne sais pas très bien où en est cette émission sur son rapport au macronisme mais il est clair que Buttigieg était présenté d'une bien meilleure manière que Castro. (12/04/2019)

Notes

* Ce soir, c'est au tour d'Amy Klobuchar de venir saluer la télé française. On verra comment elle est traitée et s'il faut que je fasse un article. C'est intéressant car Klobuchar est un peu l'inverse de Buttigieg, elle est sénatrice depuis 12 ans, on parlait d'elle avant qu'elle lance sa candidature comme quelqu'un d'important, et maintenant elle est à peine à 2% dans les sondages.

Catégories : Politique USA 2020

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