Se connecter | S'inscrire

A la recherche d'un troisième candidat

Illustration de l'article
Prélude : la direction ne peut que remarquer avec stupeur la baisse d'activité indéniable survenue depuis la mise en place des mesures de confinement liées à l'épidémie du COVID-19. La rédaction vous présente ses chaleureuses excuses et espère vite retrouver un rythme raisonnable tout en protégeant la santé de ses collaborateurs.

Il y a un peu plus de 3 ans dans notre beau pays, se tenait le premier tour de l'élection présidentielle. Le premier tour avait pour but de désigner les deux candidats qui allaient pouvoir s'affronter au deuxième tour. Il y avait trois candidats (voire 4, si on compte Jean-Luc Mélenchon qui, rappelez-vous, est passé à 600 000 voix) qui avaient des chances réelles de se qualifier pour le second tour. Finalement, Fillon fut éliminé et le second tour vit s'affronter Emmanuel Macron et Marine Le Pen. Il aurait cependant pu en être autrement, par exemple un match Macron-Fillon ou Le Pen-Fillon. Il y avait donc ce sentiment que jusqu'à la fin, nous n'étions pas sûr de qui seraient les deux finalistes.

Si je vous parle de ça, ce n'est pas pour parler de la politique française (puisque le sujet est mis en pause et qu'on n'a pas le droit d'en parler) mais pour faire le parallèle avec un autre pays de l'autre côté de l'Atlantique. Aux États-Unis, l'élection présidentielle a lieu cette année au mois de novembre, cependant nous connaissons d'ores et déjà le nom des finalistes. Il s'agit du président Donald Trump pour le parti Républicain et de Joe Biden, ancien vice-président, pour le parti Démocrate (je conçois qu'il est possible que Biden abandonne ou se retire avant novembre, mais pour le moment, cela ne semble pas être à l'ordre du jour). Voilà, c'est tout, pas de premier tour chez nos amis américains, pas de doute, pas de risque d'un troisième candidat. Cela est bien triste, non ? Pourtant dans l'histoire récente, on peut trouver des exemples de candidats "sérieux", de candidats n'appartenant pas aux deux grands partis. Regardons de plus près les dernières élections pour les trouver.

Tout le monde se souvient (du moins j'espère) de Ross Perot, le milliardaire texan qui s'était présenté à l'élection présidentielle de 1992 et avait obtenu 19% des voix et 0 grand électeur. L'échec de Perot à peser dans le système américain montre l'impossibilité pour les autres candidats de reporter l'élection. Perot avait reçu des millions de voix mais comme il n'était premier nulle part, il comptait autant qu'un obscur candidat ayant ramassé 100 voix dans le Massachusetts. Il faut remonter à 1968 pour voir une autre couleur que le rouge ou le bleu sur une carte électorale, mais les conditions de cette réussite ne peuvent s'appliquer à la situation contemporaine. George Wallace, gouverneur de l'Alabama, avait alors gagné plusieurs états sudistes qui s'étaient détournés des démocrates suite à la législation sur les droits civiques du président Johnson. C'était un changement majeur et historique qui mit fin à plus de 100 ans de domination démocrate sur le Sud (je simplifie un peu), il n'y a aujourd'hui rien de semblable. Nous n'observons dans aucune région du pays actuel un décalage tel entre les électeurs républicains et le président Trump (à part peut-être en Utah d'une moindre manière, regardez 2016 si ça vous intéresse). En 1996, Perot retenta sa chance, mais il perdit plus de la moitié de ses électeurs et atteint 8% des votes exprimés, sans doute les gens avaient compris que cela ne servait à rien.

Part de l'électorat qui a voté pour un autre candidat qu'un des deux principaux partis et précision sur le candidat arrivé en troisième position : Ces quelques exemples ne suffisent pas à démontrer quoi que ce soit, mais on peut remarquer qu'il est difficile pour les autres candidats de dépasser 2%, à l'exception de 2000 et 2016. Ces deux élections sont très ressemblantes, elles ont eu lieu sous un président démocrate populaire qui n'a pas pu se représenter après avoir servi deux mandats. Dans les deux cas, le candidat républicain, minoritaire en voix, a été élu. Ce n'est pas le moment de chercher à savoir si toutes ces conditions et ces résultats sont liés entre eux, cependant on peut déjà remarquer sans trop de difficulté que 2020 sera une élection très différente.

L'élection présidentielle de 2020 peut se décrire comme "président républicain impopulaire cherche à se faire réélire". Si on regarde notre petite liste, on peut remarquer que le vote des tiers-partis n'est pas particulièrement fort en 2004 et 2012 mais ce serait un mensonge par omission. En 1992 (j'ai mentionné cette élection quelques paragraphes plus-haut), le président George H. W. Bush (papa Bush) cherchait lui aussi à remporter un deuxième mandat dans des conditions économiques difficiles (le pays était en récession, qui s'est révélée moins importante qu'on ne le pensait à l'époque), et pourtant près d'un cinquième des électeurs se tournèrent vers Ross Perot. Sommes-nous en 1992 ? Un milliardaire va-t-il sortir de nulle part pour sauver les États-Unis de Trump ?

Non. La principale différence entre maintenant et 1992 c'est qu'à l'époque, beaucoup de gens pensaient que le parti démocrate était fini et qu'il lui était incapable de gagner une élection présidentielle. Lorsque Perot a annoncé sa candidature, les primaires démocrates n'étaient pas terminées et il dépassait même Clinton dans les sondages. Aujourd'hui, personne ne peut douter qu'un candidat démocrate peut gagner une élection présidentielle (même si certains traumatisés par 2016 affirment le contraire) et il est très simple d'imaginer une carte victorieuse pour Biden. Biden a déjà gagné les primaires et il devance Trump dans la quasi-totalité des sondages, on peut donc penser que le potentiel Perot a loupé son timing.

Si nous ne pouvons pas compter sur l'arrivée d'un homme providentiel pour occuper la troisième place cette année, alors tournons-nous vers les petits partis. Pouvons-vous attendre quelque chose du parti libertarien et du parti vert ? Si vous m'aviez posé la question il y a deux semaines, j'aurais ri. Cependant, de nouveaux candidats sont apparus récemment, beaucoup plus intéressants et médiatiques. Arriveront-ils à être élus président ? (non) Arriveront-ils à briser le bipartisme ? (non) Arriveront-ils à atteindre la barre fatidique des 5% qui permet d'obtenir la reconnaissance du gouvernement fédéral ? (peut-être) Rendez-vous demain pour la deuxième partie de notre série "A la recherche d'un troisième candidat"... (04/05/2020)

Notes

* Petit teaser pour demain : Justin le représentant, seul contre tous.

← Les primaires chamboulées ACCUEIL Justin Amash, le libertarien →